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Le Domaine de BLONAY: Comment en est-on arrivé là?

Le domaine de BLONAY s’inscrit dans l’histoire de la ville. Situé aux limites de la commune de Marin, il s’élève sur les ruines de l’antique château fort au côté de la chapelle classée Saint Étienne. Ce château permettait de surveiller les voies de communication entre le bas Chablais et le pays de Gavot et tout particulièrement le franchissement de la Dranse. En 1755, le baron Claude Louis De Blonay acquiert la seigneurie qui sera ensuite vendue comme bien national durant la Révolution. Le nouvel acquéreur fait alors construire, à l’emplacement actuel du château, une maison carrée d’un étage. En 1867, la famille De Blonay rachète la propriété, elle rehausse la maison d’un étage et fait construire un donjon carré à tenons, aspect actuel du château. Jusqu’en 1928, il est occupé par la congrégation de Saint François de Sales. Les Oblats y installent une maison d’enseignement puis différentes associations religieuses s’y succèdent. Durant cette période le château est alors connu sous le nom du « château des pères ».

1995 : la commune de Publier en fait l’acquisition.

Par une première délibération du 09 novembre 1994, M. Bernard COMONT, Maire en exercice, déclare son intention d’aliéner la propriété de l’association Roche Marin, dit Centre de St François de Sales, pour 5 ha sur le territoire communal de Publier, et 2ha sur Marin commune associée alors à la ville de Thonon. La commune de Publier en propose 914 634 € (6 MF) afin de constituer une réserve foncière et d’éviter que cette propriété se transforme en une activité « contraire à l’intérêt de la commune ». (Vote : 25 POUR, 1 ABSTENTION)

Par une seconde délibération, le 22 décembre 1994, l’offre d’aliénation est augmentée à la suite de l’avis des services fiscaux, pour un prix d’achat proposé par la commune de 1 067 073 € (7 MF) payables sur 4 exercices de 1995 à 1998. (Vote : 24 POUR, 3 ABSTENTIONS). Le domaine est ainsi affecté à un usage de centre de loisirs et aéré municipal.

2010 :  le domaine revient dans l’actualité… ou  » l’envie » de bien faire de G. LACROIX et son conseil.

L’accession de l’ETG football club en ligue professionnelle de football impose réglementairement à ce club de disposer d’un centre de formation. L’ETG se tourne alors vers ses différents soutiens pour trouver une solution qui lui est rapidement offerte par la commune de Publier et son Maire en exercice Gaston LACROIX, passionné de football. La solution proposée par la commune est de mettre à disposition l’ancienne colonie de vacances de la DGAC à port Pinard en partageant les coûts d’aménagement avec le club professionnel, site que la DGAC a en fait remis au conservatoire du littoral avec la vocation de devenir un espace naturel. Mais la commune pressée de satisfaire les attentes de l’ETG, anticipe alors un peu vite l’accord du conservatoire du littoral qui s’en offusque officiellement. Le directeur général de ce conservatoire, M. COLCOMBET, dénonce alors les libéralités octroyées à l’ETG par la commune et la coupe d’arbres remarquables pour permettre l’édification d’un terrain d’entrainement. Il faudra une intervention de Mr. Carenco, ancien Préfet de Haute-Savoie au moment du G8 d’Evian, en poste au Cabinet de la ministre de l’Environnement, pour apaiser le différend naissant entre le conservatoire national du littoral et la commune. C’est ainsi que le parc du Mottay accueillera temporairement le centre de formation et d’entrainement de l’ETG, pour un accord sur une durée d’une année,

Mais, la commune « embarquée » par cet accord temporaire doit désormais rapidement trouver un site plus adapté. Le choix se porte alors sur le domaine de BLONAY. Trop petit pour les besoins de l’ ETG, BLONAY doit être étendu au-delà des bâtiments existants, du château, de la salle des Vignes et du lavoir pour y construire les structures adaptées à un club de 1ère division (vestiaires, et surtout terrains d’entrainement) sur le modèle du centre d’entrainement des Girondins de Bordeaux. Pendant plusieurs mois, une intense activité mobilisera la commune, les services de l’État (contrôle de la légalité, DDFIP), l’ETG, les banques, les juristes et un notaire pour monter l’opération d’agrandissement et de transformation de BLONAY en centre d’entrainement et de formation. Après plusieurs hypothèses de montages plus ou moins « complexes », dont certaines visiblement inadaptées ou dangereuses, une solution juridique acceptable est finalement trouvée non sans de vifs débats internes sur la menace ou l’opportunité pour la commune de se lancer dans cette opération, sans aucun soutien des autres collectivités dont le nom figure pourtant au générique de l’ETG.

28 octobre 2010 : L’incendie du château

Vers 1 h 30 le jeudi 28 octobre 2010, une épaisse fumée et des flammes ravagent la toiture du château de Blonay. Malgré les moyens engagés par les divers centres de secours du secteur, les dégâts sont très importants. Le foyer initial se situe dans les combles, particulièrement au niveau de la tour, des espaces aménagés en dortoirs. L’édifice ne répondant plus aux normes de sécurité, aucun public n’y était heureusement accueilli depuis plusieurs années. L’origine de ce sinistre n’ayant jamais été établie (alors que la réhabilitation du château était dans les tablettes pour accueillir le centre d’entraînement et de formation de l’ETG FC), cela a alors alimenté beaucoup d’interrogations…

2011-2012 : les transactions entre la commune et l’ETG ou l’aventure passionnelle de G. LACROIX avec L’ETG.

La commune de PUBLIER engage rapidement une série de mesures en faveur de l’ETG:

  • l’acquisition de 6 ha de terrain supplémentaire au prix de 50 €/m², soit 3 M€, dont une grande partie est achetée sur la commune de Marin.
  • la délivrance d’un permis de construire avec l’avis favorable de l’architecte des bâtiments de France pour l’édification du centre de formation, de vestiaires, de 4 terrains d’entrainement dont 1 synthétique. Deux terrains sont seulement réalisés pour environ 8 M€…
  • l’établissement d’un bail à construction aux conditions extrêmement avantageuses pour l’ETG sur 30 ans avec un loyer annuel de 32 500 € (alors que le loyer fixé initialement par les services fiscaux variait entre 100 et 150 000 €)
  • la rédaction quasi immédiate d’un avenant à ce bail, retirant les constructions existantes du bail et ajoutant deux parcelles sans augmentation de loyer.

Dans le même temps diverses mesures interviennent :

  • le versement de l’indemnité de sinistre de l’incendie pour 516 000 € par convention à l’ETG pour la sauvegarde du château dont seule la toiture sera refaite, le reste fortement dégradé restant en l’état suite à l’incendie avec l’engagement du club à en faire son siège administratif…
  • le versement d’un loyer d’origine de 500 000 € de l’ETG vers la commune, et le versement d’un second loyer de 350.000 € (après déduction des 150.000 euros de subvention accordée par l’Etat) …
  • l’intercommunalisation du projet avec THONON et EVIAN à coup de subventions « pour les jeunes » ou dans la perspective de transformation du stade MOYNAT à Thonon… avec photos des élus locaux de l’époque dans la presse, tous unis, chacun à leur niveau d’engagement.
  • diverses subventions de l’État, de la Région et du département soit à la commune (150.000 € de subvention via l’Etat) soit à l’ETG, dont certaines concernant la mise à niveau du stade d’Annecy pour 2 300 000 €
  • le versement de plusieurs dizaines de milliers d’euros de subventions des différentes communes locales à la structure jeune du club… (120 000 € d’Evian, 80 000 € de Publier en 2011…). Bref une mobilisation tous azimuts pour soutenir ce club de la part des collectivités, des entreprises et du public à l’échelle de la Haute Savoie.

L’engouement Haut Savoyard pour l’ETG atteindra son apogée le 31 mai 2013 en finale de la coupe de France au stade de France ou le club perdra 2 à 3 contre les girondins de Bordeaux avec diverses primes versées aux joueurs et au Président P. TROTIGNON (100 000 €).

Passé cet épisode glorieux, et dès l’année suivante le retrait annoncé de DANONE, mécène et partenaire financier historique, entraîne l’éviction du président TROTIGNON pris dans des enjeux de gouvernance entre 3 actionnaires M. Bakhtiar, Tumbach et Bontaz. Cette séquence s’accompagnera aussi du départ d’actionnaires minoritaires emblématiques avec les anciens joueurs de l’équipe de France de 98 (Zidane, Lizzarazu…), et de plusieurs administrateurs, dont Jean Louis Escoffier.

2014 : Le début de la fin de l’aventure ETG … les premiers désappointements. 

le 23 décembre 2013, juste avant le vote du budget 2014, Gaston LACROIX motivera dans un article du Dauphiné, l’arrêt des subventions à l’ETG en « évoquant pêle-mêle les valeurs morales et les dérives du football …. sans que cela n’ait à voir avec l’éviction de son ami P. TROTIGNON…la volonté municipale de reverser cette somme à un groupement Evian-Amphion pole d’équipes des U15, U17 et U19″. Cette déclaration qualifiée « d’étonnante » par les journalistes alors que G. LACROIX venait d’inaugurer le centre de formation de l’ETG quelques jours plus tôt, sera tout de même actée en conseil municipal du 24 février 2014 avec la réorientation des subventions vers le « groupement ».

De 2014 à 2017 la commune de Publier sera alors la seule collectivité à contribuer à ce groupement avant que ces sommes ne soient affectées au CSAP dans leur subvention annuelle. Le club est alors présidé par un tandem E.BAKTHIAR, TUMBACH….de 2014 à 2017.

2017 : liquidation de l’ETG et rachat du Domaine de Blonay… ou les risques du football professionnel

La Direction nationale du Contrôle de gestion (DNCG) invalide le budget et la proposition de rachat de l’ETG conduisant ainsi au dépôt de bilan et à la liquidation de l’ETG. Le club et sa section professionnelle sont liquidés, aucune offre de reprise n’étant proposée eu égard au déficit estimé entre 11 et 17 M€. Cette liquidation entraine en outre le licenciement d’une quarantaine de collaborateurs du club. A contrario le centre de formation et des équipes jeunes, sont sauvés, grâce notamment à la mobilisation de Jean Louis ESCOFFIER. Se tournant à nouveau vers les collectivités pour sauver ce qui peut l’être, il n’obtient malheureusement que peu de soutien sonnant et trébuchant…

Pour la section professionnelle, tous les actifs sont alors mis aux enchères dès l’été 2017 pour payer les multiples créanciers du club, au 1er rang desquels l’URSSAF.

L’Etat, via la DDFIP, hypothèque le domaine pour se payer et obtient en suivant du liquidateur judiciaire la mise aux enchères du bail du domaine de BLONAY.

La mise à prix du bail pour 1 M€ ne trouvant pas d’acquéreur, le prix d’achat est alors descendu par paliers de 250 000 € pour atteindre le plancher de 250 000 € où seul Mr Ravy TRUCHOT se porte acquéreur, récupérant ainsi tous les droits du bail à construction. L’hypothèque est alors automatiquement levée et M. TRUCHOT peut développer son académie de Football pour laquelle les collectivités échaudées, se mobilisent peu, l’État jouant un rôle facilitateur pour qu’une activité reprenne. Dès lors, l’ICEF est créé.

Dès 2018 le nouveau bailleur sollicite l’acquisition du domaine comme lui en donne le droit dans son bail, avec des négociations conduites par courriers réciproques entre Gaston LACROIX et Ravy TRUCHOT. Ces négociations échouent définitivement avec la précédente municipalité en juillet 2019 à la suite d’une entrevue et des propos maladroits alors que l’acquéreur avait pourtant validé une offre écrite à 3,1 M €. Les relations se désagrégeant entre G. LACROIX et R.TRUCHOT, ce dernier revient alors sur son offre en août 2019 en proposant 2,4 M€, s’appuyant légalement sur les dispositions du bail qui lui permettent de déduire le montant des travaux qu’il a réalisé depuis sa reprise du domaine. Dès lors tout échange sur le dossier Blonay avec Gaston LACROIX devient compliqué et R.TRUCHOT choisit d’attendre le départ annoncé de G. LACROIX et l’arrivée d’une nouvelle équipe municipale en 2020.

2020-2021 : la reprise du dossier de Blonay par la nouvelle équipe municipale, présidée par J. GRANDCHAMP

Durant toute l’année 2020, en raison de la pandémie, aucune relation n’est établie entre Ravy TRUCHOT, confiné aux Etats-Unis, et la nouvelle municipalité. Celle-ci prend toutefois la mesure de ce dossier et se trouve confrontée à un choix :

– laisser le dossier dans une impasse, en refusant la vente aux conditions proposées par R.TRUCHOT, et en se contentant de percevoir le modeste loyer consenti par la municipalité précédente jusqu’à la fin du bail, c’est-à-dire 2042, avec le risque évident que la commune soit entretemps contrainte à la vente par voie de justice à des conditions très défavorables puisque toute construction nouvelle sur le domaine serait déduite du prix de la vente.

– renouer le dialogue avec Ravy TRUCHOT pour débattre de la vente du domaine.

Après consultations juridiques, auditions de divers protagonistes de ce dossier, analyse des avantages et inconvénients, Jacques GRANDCHAMP, nouveau maire de la commune, prend alors contact avec R. TRUCHOT en fin d’année 2020 pour rétablir le dialogue.

A réception de la dernière estimation des Domaines, le 22 janvier 2021, les échanges reprennent dans un climat dépassionné et apaisé. Dès lors l’application des droits réels du titulaire se met en place conformément à l’article 13 du bail qui confère, entre autres possibilités, de déduire effectivement les travaux réalisés par le preneur, avantage consenti pourtant par G. LACROIX dès le bail initial à feu l’ETG. Vérifié contradictoirement par deux cabinets d’avocats spécialisés, le projet de vente pour 2.440.000 € est alors proposé au conseil municipal du 17 mai 2021, qui l’approuve (Vote : 24 POUR, 3 ABSTENTIONS) et autorise le maire à entreprendre la vente.

Pour quelles raisons cette issue a-t-elle été privilégiée ?

En raison des considérations suivantes :

1° R.TRUCHOT a obligation, selon les termes du bail, de construire les deux derniers terrains de football avant la fin d’année 2022, obligation qu’il n’envisage pas de satisfaire sans devenir propriétaire des lieux,

2° Le bail consenti à R. TRUCHOT l’autorise effectivement à déduire du prix d’achat les dépenses qu’il a engagées sur le domaine pour lesquelles il a produit les factures certifiées par un cabinet comptable indépendant,

3° Le statu quo au « bras de force  » souhaité par G. LACROIX n’était donc pas envisageable, car il aurait conduit :

– Soit à amener R. TRUCHOT à renoncer à son projet. Donc à s’engager dans une voie incertaine pour l’avenir du domaine avec le risque d’une revente à d’éventuels acquéreurs que la commune n’aurait pas souhaité (tel que B. COMONT l’avait justement pensé à l’origine en acquérant le domaine).
– Soit à rééditer un 2nd naufrage – d’un club amateur cette fois-, ou la commune se serait trouvée face à la même situation qu’à la liquidation de l’ETG c’est à dire avec un domaine et des bâtiments, potentiellement en friche, engageant éventuellement une action publique avec de nouveau des sommes considérables.

Jacques GRANDCHAMP et son équipe municipale ont donc privilégié la voie de l’intelligence, de l’humilité et de la sagesse dans un dossier ou sous les mandatures précédentes on ne peut que constater l’outrance de l’argent – celui des contribuables – investi dans le football, dont le montant total est estimé au prix d’une école neuve.